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06/11/2011

Eolien


 

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 "Le Schéma Régional Éolien de la Bourgogne :

mauvaise plaisanterie ou escroquerie ?"

 

Le projet de Schéma Régional Éolien de la Bourgogne a été mis en consultation publique  pendant le mois d'octobre 2011.

Le SRE de la Bourgogne est censé résumer les intentions de la Région en matière éolienne. Ce document de 30 pages, publié sous la double signature du Président de Région et de la Préfète de Région, se termine par une conclusion pour le moins surprenante : les promoteurs éoliens peuvent présenter n'importe quel projet n'importe où... ou presque. La dimension « protection de l'environnement et du cadre de vie des citoyens » n'est abordée que d'un point de vue purement réglementaire. Les autres régions ont expliqué dans leur SRE ce qui leur tenait à cœur. Pas la Bourgogne. 

 Dans son état actuel, le projet qui sera soumis à l'approbation des conseillers régionaux ne répond ni à l'esprit de la loi, ni aux obligations imposées par la loi. La loi demande de préciser les zones géographiques où des projets éoliens peuvent être envisagés. En donnant à l'ensemble du territoire régional le statut d'un vaste gisement éolien uniforme, la Bourgogne se place hors du cadre légal. Elle est d'ailleurs la seule région à pratiquer cette stratégie incompréhensible.

 Enfin, la qualité des études présentées dans le SRE laisse à désirer. Là encore, la Bourgogne n'a pas joué le jeu. Réunir quelques groupes de travail en séminaire pour lister des contraintes environnementales tirées de documents administratifs ne peut tenir lieu d'étude. Il est en outre malhonnête d'affirmer que la cartographie présentée résulte « d'analyses à dire d'experts » lorsque ce n'est manifestement pas vrai. Pour un document de cette importance, les citoyens étaient en droit d'attendre de véritables études, réalisées par des experts en environnement de notoriété reconnue.

 L'analyse du SRE de la Bourgogne débouche sur une seule conclusion possible : un document servant d'alibi à des conclusions ridicules ne peut avoir aucune crédibilité.

 

Des chiffres tirés du chapeau

D'ici à 2020, la Région Bourgogne se propose d'installer 1500 MW d'éoliennes sur son territoire, soit 500 à 600 machines. La seule justification de ces chiffres figure dans le SRCAE (Schéma régional climat air énergie) de la Bourgogne : l'énergie éolienne et le bois-énergie sont « les deux énergies les plus facilement mobilisables à court terme... il s'agit de partager un effort de 6 000 GWh entre l'éolien et le bois-énergie en affectant 48% à l'éolien ».

 La Région Bourgogne comprend les départements les moins ventés de France ne suscite aucune réflexion de fond. Le problème est évacué en deux phrases, pour glisser sur des considérations techniques qui n'apportent rien au débat. Les 500 à 600 machines apparaissent bien comme le fait du prince. L'énormité de ces chiffres jette en outre une suspicion légitime. On est en droit de se demander quel a été le poids du lobby éolien dans une telle décision.

Un permis de chasse sur tout le territoire

Rappelons que le schéma régional éolien a pour but de définir clairement les objectifs de la région en matière de puissance éolienne à installer, mais aussi de définir clairement les secteurs géographiques de la Région où les promoteurs pourront déposer des projets. Or le schéma régional éolien de la Bourgogne ignore complètement ces « zones infra-régionales favorables au développement de l'éolien » prévue par la loi du 12 juillet 2010-788 dite « Grenelle 2 », par les décrets d'application de la loi, et par l'instruction ministérielle du 29 juillet 2011.

 Le SRE de la Bourgogne se contente de déclarer que l'ensemble du territoire bourguignon, à l'exception de quelques communes, est favorable au développement de l'éolien. Comment peut-on arriver à une telle conclusion ?

 

Un tour de magie cartographique, … et un SRE vide de sens

On commence par dresser des cartes des sensibilités rencontrées au regard de différents critères : paysages, milieux naturels, habitat... puis on superpose ces cartes, et... miracle, on s'aperçoit qu'il reste des petits morceaux de territoires qui échappent à la somme des sensibilités, et que chaque commune en comporte au moins un. On en tire prétexte pour déclarer que sur toute commune, aussi « sensible » soit-elle, il reste toujours au moins une superficie de 15 hectares susceptible d'accueillir 5 éoliennes. Toutes les communes sont derechef déclarées « favorables à l'éolien », et par conséquent tout le territoire de la Bourgogne. À l'exception d'une toute petite liste de communes, qui échappent à ce classement péremptoire.

 Cette manipulation cartographique ferait rougir n'importe quel professionnel de l'environnement. La mesure de la sensibilité environnementale d'un territoire ne peut se réduire à l'addition ou à la soustraction de pixels sur une carte à grande échelle, et encore moins se terminer par un tour de passe-passe grossier. Une méthode qui déconsidère ses auteurs.

 La manœuvre est claire : elle vise à créer un maximum de « surface éolienne » pour que les promoteurs éoliens puissent présenter des projets dans toutes les mairies. La ministre de l'environnement recommandait certes un SRE ambitieux au niveau des surfaces éoliennes. Mais elle serait sans doute fâchée de voir comment ses instructions sont détournées pour aboutir à un SRE vidé de tout sens, puisque les projets éoliens deviennent possibles partout. 

 

Un schéma régional éolien hors du cadre légal

Le SRE de la Bourgogne assimile les communes à des « zones favorables » en inventant le terme de « commune favorable ». Au mépris de la loi, et de l'instruction ministérielle qui précise bien que le schéma régional éolien doit comporter « les objectifs quantitatifs de développement de l’éolien, à l’échelle de la région et par zone infra-régionale favorable à ce développement ». De plus, il doit en comporter la description : « Vous veillerez à assortir ces zones d’objectifs qualitatifs visant à prendre en compte la préservation de l’environnement et du patrimoine dans les futurs projets ».

 En son état actuel, le projet de SRE de la Bourgogne qui sera soumis à l'approbation des conseillers régionaux ne comporte pas les pièces réclamées par la loi.

 De plus, la loi prévoit que le schéma régional éolien est opposable aux projets déposés en dehors des « zones favorables au développement de l'éolien ». Le SRE de la Bourgogne n'en comportant aucune, il n'est opposable à aucun projet ! 

 

Des bourdes     

L'« orientation régionale »  du SRE de la Bourgogne expédie en deux lignes le sort réservé à la forêt : « Les forêts, dont le territoire bourguignon est largement couvert, ne constituent également pas des zones d'exclusion. » En d'autres termes, la forêt n'a aucune importance particulière, et peut être livrée aux appétits des promoteurs éoliens. Là encore, l'absence de réflexion est manifeste. Travail bâclé dans l'urgence, ou vision de décideurs qui n'ont jamais mis les pieds dans un bois ?  

 Cette formulation est en tout cas inacceptable pour les propriétaires forestiers de Saône-et-Loire lorsqu'on sait que la plupart des projets éoliens présentés dans ce département comporte le défrichement de forêts de crête, avec de vastes opérations de déblais-remblais. On ne peut pas non plus ignorer le rôle tenu par les forêts de crête dans les paysages de Saône-et-Loire, ni leur intérêt aux plans de la faune et de la flore.

 

Des impasses

Les références citées dans le SRE en matière d'étude paysagère ne concernent que des travaux effectués sur les paysages de Côte-d'Or et de l'Yonne.

Le lecteur comprend rapidement qu'il n'existe pas de travaux sérieux effectués sur les paysages de Saône-et-Loire. Pour ce qui concerne ce département, l'aspect de la carte « sensibilité paysagère et vigilance patrimoniale » produite ne laisse subsister aucun doute. Les crêtes, éléments très sensibles du paysage, n'apparaissent que très partiellement. Des sites aussi connus au plan départemental et aussi appréciés que le site de Mont-Saint-Vincent, ou la Butte de Suin, ne sont même pas cités.

 Cynisme ou angélisme ?

L' « orientation régionale N° 45 » du SRCAE de la Bourgogne comporte un petit discours sur l'acceptation des projets, en particulier sur l'acceptation des projets éoliens. Elle préconise que « les acteurs de la filière fassent preuve de plus de transparence et impliquent riverains et acteurs locaux le plus en amont possible ». Elle souhaite que « les démarches de concertation et de consultation publique soient encouragées ». Un vœu pieu relevant du plus pur angélisme.

 En ce qui concerne la Saône-et-Loire, le constat actuel est accablant. Le démarchage des élus s'est toujours fait jusqu'ici dans la plus grande discrétion. L'information donnée aux maires sur l'impact des parcs éoliens a été pratiquement inexistante. La prise en compte de l'environnement local a été absente d'un discours exclusivement centré sur les retombées financières. Enfin, les promoteurs ont systématiquement cherché à éviter toute information et toute participation de la population concernée.

 

L'environnement aux abonnés absents

La lecture de SRE de différentes régions fait apparaître clairement les manques du SRE de la Bourgogne. Chaque page du SRE traduit le manque d'enthousiasme de la région Bourgogne pour protéger son patrimoine. Encore faut-il savoir clairement ce à quoi on tient, et ce que l'on veut absolument protéger. Les autres régions l'ont fait. Pas la Bourgogne, qui a choisi de privilégier le développement de l'éolien.

 Se contenter de rappeler la liste des protections réglementaires n'est pas suffisant. Il était prévu de consulter largement les instances départementales, dont les associations, pour savoir ce que souhaitent réellement les citoyens. Cela n'a pas été fait. 

 Enfin, les « orientations régionales » exprimées dans le SRE ne sont pas faites pour modérer les appétits des promoteurs éoliens. On espère que les promoteurs éoliens se conduiront mieux, alors même qu'on les encourage à mettre le pied dans la porte de toutes les mairies.

 


   

Christiane Colas

Conseiller régional de Saône-et-Loire

11:42 Écrit par La Vaire | Lien permanent | Commentaires (0)

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